Le contreventement des bâtiments 2/2

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Le contreventement est l’ensemble des dispositifs permettant d’assurer la stabilité d’un ouvrage vis-à-vis des sollicitations horizontales. C’est un élément essentiel dans la conception d’un ouvrage. La compréhension du phénomène et des problématiques liées est un préalable nécessaire pour sa conception et son dimensionnement.

Une structure bien conçue doit pouvoir assurer sa stabilité sous l’action de n’importe quelle charge extérieure et notamment sous l’action des charges horizontales (pression du vent sur les façades, secousses sismiques, chocs de véhicules…).

Autrement dit, la conception générale d’une structure, ainsi que de chacun de ses composants, doivent permettre d’assurer la descente des charges horizontales depuis leurs points d’application jusqu’aux fondations.

Définition :

L’ensemble des éléments structuraux destinés à assurer la descente des charges horizontales s’appliquant sur un bâtiment est appelé système de contreventement.

Le contreventement d’un bâtiment doit être pensé dès sa conception, car ce sont la géométrie globale et le positionnement en plan des éléments les plus rigides qui déterminent en grande partie la bonne répartition des efforts dans la structure. Les géométries simples et compactes sont donc à privilégier. À l’opposé les formes en U ou en L sont à éviter car elles posent des problèmes de concentration de contraintes au niveau des angles et font apparaître de la torsion d’ensemble. La disposition en plan des éléments de contreventement est également très importante. Un mauvais positionnement et/ou une mauvaise répartition des éléments rigides entraîne nécessairement une torsion du plancher qui génère des efforts supplémentaires dans les éléments de contreventement.

La notion de torsion est donc très importante pour l’étude des structures vis-à-vis des efforts horizontaux et on verra que celle-ci peut être évitée en faisant coïncider le centre de torsion avec le point d’application de la charge. Par exemple dans le cas d’une structure soumise aux efforts de vent, l’adoption d’un système de contreventement symétrique est une bonne réponse à ce problème de torsion.

Origine des efforts

Les sollicitations horizontales auxquelles sont soumises les structures bois proviennent pour des efforts de vent ou de sollicitations sismiques.

Les efforts de vent sont fonctions en plus de la situation géographique, de l’orographie (science géographique du relief), de l’exposition de l’ouvrage et de la volumétrie du bâtiment.

Les sollicitations sismiques dépendent principalement de la zone sismique dans laquelle se trouve le bâtiment, de la géométrie du bâtiment, de sa régularité en plan et en élévation, de sa masse et de la nature du sol sur lequel il se trouve, il faut s’assurer de la capacité de celui-ci à recevoir une construction dans de bonnes conditions.

Le tremblement de terre engendre des effets de deux natures,

- des effets directs, les tremblements de terre sont engendrés dans des plans de faille et provoquent un déplacement au niveau de la faille qui peut être vertical et (ou) horizontal et qui peuvent entraîner des déplacements en surface, un choc et une propagation des ondes sismiques dont l’amplitude et la durée sont influencées par la qualité du sol sous les bâtiments.

- des effets indirects, sous l’effet du tremblement de terre, l’ébranlement des sols va entraîner des pertes de cohésion de ces sols qui vont se traduire par des liquéfactions des sols (perte de la résistance des sols sous les constructions), des affaissements ou des tassements des sols.

Comme on le voit, les deux calculs d’efforts de vent et de séisme sont assez différents. Les efforts sismiques faisant intervenir notamment des notions de période et de dissipation d’énergie, un ouvrage bien conçu pour résister aux efforts de vent ne le sera pas nécessairement pour la résistance au séisme.

 Mode de propagation des efforts dans la structure

Dans une structure de bâtiment, les efforts horizontaux appliqués au plancher sont transmis aux fondations par l’intermédiaire des éléments de contreventement. Ces éléments de contreventement peuvent être décomposés en deux familles :

- les éléments horizontaux comprenant les planchers et la toiture,

- les éléments verticaux réalisés par les murs, les murs de refend, des portiques rigides ou encore des structures triangulées et des noyaux.

La transmission des efforts jusqu’au sol est assurée par cisaillement entre les pointes ou vis et le platelage des planchers puis par cisaillement et traction/compression entre les éléments verticaux et les fondations, dalle, murs ou pilotis. Ce cheminement des efforts dans la structure est rendu possible par une rigidité suffisante dans leur plan de chacun des éléments.

Le comportement de la structure dépend donc fortement du comportement de chaque élément de contreventement pris individuellement qu’ils soient verticaux ou horizontaux. Le comportement de ces différents éléments est complexe, car il dépend à la fois de leur géométrie (élancement, section), de leur composition, de leur positionnement et de leur rigidité relatifs dans le plan, de l’importance des charges verticales appliquées sur ces éléments.

1 – Les efforts sont collectés par les surfaces verticales.

2 – puis ils sont transmis aux structures horizontales, les diaphragmes composés du chaînage, des solives, du platelage et éventuellement de la chape.

3 – Le diaphragme horizontal doit être suffisamment rigide pour ne pas se déformer.

4 – Distribués au système vertical d’ancrage que sont les murs d’ossature composés de montant et du voile travaillant.

5 – Les murs transmettent les efforts au sol.

6 – Pour être transmis aux fondations via les chevilles d’ancrage au sol.

Il existe deux grands principes pour réaliser le contreventement vertical : par noyau ou par refend. Le contreventement par noyau est réalisé en positionnant au centre de la structure un élément rigide destiné à reprendre l’intégralité des charges horizontales. Ce sont généralement les circulations verticales telles que les cages d’ascenseur ou d’escalier qui remplissent cette fonction. Dans un contreventement par refends, la rigidité est assurée soit par des panneaux rigides (murs en ossature bois rigidifiés par panneaux, murs en bois massif contrecollé) soit par la création de palées de stabilité triangulées ou encore par des portiques rigides.

Le contreventement vertical doit être conçu de manière à stabiliser la structure sur toute la hauteur de l’ouvrage tout en apportant un minimum d’efforts aux fondations.

 Contreventement par haubans :

Ce bâtiment est construit avec des poteaux bois contreventés dans les angles par des haubans. Le contreventement métallique passe au travers du poteau central pour des raisons d’encombrement.

Les haubans sont doublés pour éviter la flexion des poteaux. Des butons sont placés à mi-hauteur pour rigidifier l’ensemble et contrer la flexion naturelle des poteaux.

Les haubans sont maintenus en position par des ferrures boulonnées dans les poteaux.

Le bâtiment a une hauteur d’environ 10 mètres et 50 mètres de longueur.

  Les murs à ossature en bois (éléments verticaux)

Tout élément rigide dans son plan et fixé au sol peut servir au contreventement vertical. Les solutions présentées ci-après sont les plus fréquemment rencontrées dans les structures bois.  Cette liste n’est bien sûr par exhaustive. Les bâtiments construits en ossature bois sont composés d’une structure primaire en bois rigidifiée soit par triangulation (écharpe), soit par des panneaux rigides (Voile de contreventement). Le mode de calcul et de vérification n’est évidemment pas le même.

En raison de la faible utilisation des murs en écharpes, nous traiterons exclusivement des murs contreventés par panneaux.

Les murs à ossature bois sont composés d’une ossature porteuse réalisée par assemblage de montants et de lisses généralement en bois massif. Dans certains cas, et en particulier dans le cas de mur de grande hauteur, des entretoises sont fixées entre les montants afin d’éviter le flambement.

Les panneaux de bois sont ensuite fixés sur cette ossature.     Généralement un panneau est fixé sur trois montants par des pointes ou des agrafes. L’ensemble des trois montants, des lisses associées et du panneau constitue ce que l’on appellera un panneau de mur. Le mur dans son ensemble est alors composé de panneaux de mur liés ensemble par des tirefonds, vis ou boulons. La continuité des lisses inférieures et supérieures permet d’assurer un fonctionnement global de plusieurs panneaux de mur.

L’ancrage au sol est assuré soit par des chevilles à expansion qui sont implantées directement dans la dalle ou la longrine pour reprendre les efforts de cisaillement soit par la mise en place d’équerres boulonnées sur la dalle permettant de reprendre les efforts de soulèvement dans le cas d’implantation de murs finis.

  Les murs en bois massif contrecollé

Les panneaux en bois massif contrecollé sont élaborés à partir de lames de bois (épicéa généralement) collées entre elles à plis croisés. En fonction du nombre de plis, les épaisseurs varient entre 5 et 30cm.

Ce type de panneau est utilisé directement en structure.

Il est possible de pré-fabriquer complètement des pans de murs entiers en usine et limiter ainsi les assemblages.

Les dimensions sont limitées par le transport et la manutention. Leur rigidité leur permet d’être utilisés pour le contreventement des structures. Comme pour la construction par murs à ossature bois, il existe un nombre important de solutions pour l’assemblage des différents éléments. Les assemblages des éléments entre eux et aux fondations sont très importants dans le dimensionnement et le calcul de raideur.

Le contreventement horizontal est réalisé généralement par des dispositions constructives au niveau des planchers et de la toiture. Il est assuré par un diaphragme constitué de solives d’un platelage et éventuellement d’une dalle collaborante et des éléments de chaînage dans le cas de bâtiments à étages, soit par la réalisation de poutres au vent généralement obtenues par triangulation des éléments de stabilité.

La poutre au vent est réalisée à l'aide de deux poutres enserrées dans deux fermettes qui permettront de reprendre les efforts de vent sur les pignons et de supporter les échelles de toiture. Les efforts seront transmis aux murs par les éléments de stabilité de la charpente et les équerres d’ancrage.

Remarque : Réalisation d'une poutre au vent

Les poutres sont vissées sur les deux lambourdes elles mêmes clouées sur les deux fermes. Le faîtage est libre.

La poutre au vent en attente de pose, l'entraxe entre les fermes est maintenu par une pièce de bois qui sera retirée après la pose des lisses anti-flambement.

 

Les diaphragmes ont pour fonctions de :

- Transmettre les efforts horizontaux aux éléments de contreventement verticaux par cisaillement.

- Raidir le bâtiment dans son ensemble et ainsi prévenir le déversement des éléments porteurs verticaux.

 

Principe du diaphragme rigide :

On appelle diaphragme rigide tout plancher haut (ou toiture) contreventé de telle sorte qu’il peut se comporter à la manière d’une poutre. Les appuis de cette poutre seront les palées de stabilité. De la même manière qu’une poutre “classique” est stabilisée par le blocage de 3 degrés de liberté (1 encastrement OU 1 articulation + 1 appui glissant OU 3 appuis glissants), il faut bloquer au minimum 3 degrés de liberté du diaphragme rigide pour assurer sa stabilité.

La répartition des efforts entre les éléments verticaux dépend directement de la nature du plancher. On peut définir deux types de planchers correspondant à deux comportements vis-à-vis des efforts horizontaux : les planchers souples et les planchers rigides.

Contreventement de toiture par haubanage Triangulation entre les arbalétriers

Les planchers

Le choix du type de plancher dépend d’un grand nombre de facteurs : structurel, esthétique, acoustique, feu, thermique, etc. Ainsi, on distingue dans les constructions en bois principalement trois grands types de plancher : le plancher traditionnel composé de solives et de panneaux rigides, le plancher en bois massif contrecollé, et enfin le plancher mixte bois béton.

Pour chaque type de plancher sont présentés la composition générale, les dispositions constructives et enfin les points importants pour le contreventement.

Composition :

Il se compose d’un réseau de poutres et solives reposant sur les éléments porteurs de la structure. Les solives sont constituées au choix de poutres en bois massif (généralement en résineux), de poutre en I (ex : âme en OSB et membrure en bois massif, LC ou Kerto, agglomérés, etc.) ou de bois contrecollé. Des poutres en bois lamellé-collé, lamibois LVL (Laminated Veneer Lumber) ou encore en bois reconstitué LSL (Laminated Strand Board) ou tout simplement en bois massif sont utilisées pour réaliser le pourtour du plancher afin d’assurer un chaînage périphérique permettant

de rigidifier l’ensemble. Lorsque le plancher doit jouer le rôle de diaphragme, cette propriété est apportée soit par apposition de panneaux de bois en surface vissés sur les solives, soit par réalisation de poutres au vent entre les solives. Les panneaux de bois peuvent être au choix de type OSB (Oriented Strand Board), contreplaqué ou encore de type Kerto. Les poutres au vent sont réalisées par triangulation, les diagonales et les montants du treillis ainsi formé sont généralement en bois massif ou à l’aide d’un feuillard métallique.

Liaison avec les éléments verticaux :

     Pour une structure entièrement en bois, la liaison se fait par l’intermédiaire d’assemblages assez divers parmi lesquels on retrouve les sabots, la pose d’une murallière, ou encore la mise en place de ferrure en âme fixée dans la ceinture du mur.

Assemblage bois-béton par ferrure en âme Assemblage bois-bois par ferrure en âme Assemblage bois-bois par sabot

Intérêt pour le contreventement :

Ce type de plancher fonctionne très bien dans le cas de structure entièrement en bois dans la mesure où il est bien contreventé (panneaux bois ou poutre au vent). Il permet de jouer le rôle de diaphragme et de répartir les efforts horizontaux entre les éléments.

Le plancher en bois massif contrecollé

Composition :

Les planchers de bois massif contrecollé sont réalisés de la même manière que les murs en bois massif contrecollé. Ces panneaux sont structurels et ne nécessitent pas de solivage. Comme pour les murs, ils sont au maximum préfabriqués en usine (ouvertures comprises).

Liaison avec les éléments verticaux :

La liaison avec les murs peut se faire directement par des pointes en positionnant le plancher sur le mur. Sur des éléments d’ossature bois, le plancher peut être fixé soit par des cornières, soit par l’intermédiaire d’une muraillère. La fixation aux éléments en béton ou en maçonnerie est réalisée soit par une cornière fixée au béton, soit en positionnant le plancher sur l’élément en maçonnerie.

Principes de bases :

Pour équilibrer une force agissant dans n’importe quelle direction du plan, il faut disposer d’au moins trois lignes de forces :

-      les lignes d’actions des forces ne doivent pas être concourantes

-      les lignes d’action des forces ne doivent pas être toutes parallèles entre elles

Analogie :

Le contreventement d’un bâtiment suit en grande partie les règles d’isostatisme. Pour pouvoir stabiliser un bâtiment il est nécessaire de supprimer les six degrés de liberté possibles, à savoir les trois translations suivant (O, x, y, z) et les trois rotations autour des axes (O, x, y, z).

Supposons un bâtiment placé dans un repère (O, x, y, z) la cote suit la hauteur du bâtiment. Si ce bâtiment possède un diaphragme rigide, il reprendra les efforts suivant trois degrés de liberté (Rx, Ry, Tz) puisqu’il s’agit d’un plan. Les murs qui soutiennent ce diaphragme rigide devront eux reprendre les efforts suivants Tx, Ty et Rz.

Le contreventement consiste à assurer la stabilité longitudinale d’un ouvrage à partir de « barres » formant une triangulation entre les éléments de structure (portiques ou arcs, pannes, lisses, poteaux…) représentant des « cadres » déformables initialement.

Ces barres peuvent être en bois reprenant des efforts de traction ou de compression, mais aussi en métal reprenant uniquement des efforts de traction ; ce deuxième cas nécessite alors une disposition systématique en croix de Saint André.

Les dispositifs

En toiture, l’ensemble formé par les portiques (ou arcs), les pannes et les « barres » est appelé : poutre « au vent » ; les schémas ci-dessous présentent les principaux dispositifs :

Croix de Saint André (souvent métallique)
Treillis en « N »
Treillis en « V »
Treillis en « V » (sous les pannes)
Treillis en « K »

Pour des pressions de vent conséquentes et (ou) sur des grands ouvrages, les barres de contreventement sont disposées entre d’autres travées afin de répartir de manière uniforme les efforts ; ce dispositif forme un ensemble appelé : poutre d’égale résistance :

Treillis en « K »

(pour l’illustration)

 

D’une manière générale, le contreventement de toiture forme une ceinture au niveau des rives ; le schéma ci-dessus sans les dispositifs en est l’illustration.

La modélisation : 

Pour dimensionner le dispositif de contreventement en toiture, la modélisation s’effectue sur un demi-pan. On dissocie les ouvrages d’une longueur inférieure ou supérieure à 60 mètres.

Ouvrage inférieur à 60 m

Ouvrage supérieur à 60 m

pent. : pression linéique d’entraînement (daN/m)

ppig. : pression linéique sur pignon (daN/m), avec  pour chaque poutre « au vent »

p’pig. : pression linéique sur pignon (daN/m), avec  pour chaque poutre « au vent » de pignon et avec  pour la poutre « au vent » centrale

Aux points T sont transmis les efforts induits par les poutres « au vent » aux palées de stabilité ; la position de ces points est fonction de la position d’accrochage supérieure des barres de contreventement dans les palées de stabilité.

Les dispositifs : 

En paroi verticale, l’ensemble formé par les portiques (ou arcs), les pannes sablières (ou lisses) et les « barres » est appelé : palée de stabilité ; les schémas ci-dessous présentent les principaux dispositifs avec le vent venant de la gauche :

Croix de Saint André (Souvent métallique)

Treillis en « N »

Treillis en « V » (sur 2 travées)

 

Treillis en « K » (simple)

 

Treillis en « K » (double)